« Mauvaise bête » fait partie du recueil posthume et inachevé de João Guimarães Rosa (1908-1967), Ces histoires, publié peu après sa mort, en 1969. Dans cette nouvelle, l’une des rares à caractère semi-autobiographique (l’auteur ayant exercé brièvement la profession de médecin de campagne), un jeune fazendeiro se fait mordre par un serpent à sonnette. Sa famille, très superstitieuse, refuse de lui donner les médicaments qui pourraient le sauver. La nouvelle s’ouvre sur la description minutieuse du serpent, l’un des plus grands dangers auxquels doivent quotidiennement faire face les habitants du sertão, où l’action se déroule.
C’était un être en tout linéaire, élémentairement réduit, collé flasque au sol, tortueux et intense ; énorme, un mètre soixante de l’extrémité des narines au dernier anneau crécellé de sa cascabelle. C’était une boïcininga – le serpent.
Il faisait beau et, tout juste réchauffée, la boïcininga abandonnait en se dénouant le terrier de tatou abandonné où, inerte, elle avait passé les mois froids et quitté les lambeaux de sa vieille peau décolorée, aux dessins désormais imprécis et aux couleurs ternies. Muée, maintenant, sa nouvelle peau ne reluisait pas pour autant, mais se pré...
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