Le récit est conté par Gilbert Ponté, qui tient toute la pièce sur ses épaules pendant soixante-dix minutes : il est seul en scène, exercice périlleux par excellence. Mais par sa présence imposante, sa gestuelle raffinée, sa diction parfaite, son sens de la scène, le comédien-conteur parvient à soutenir l’attention des spectateurs et à dérouler, dans le respect du texte (très légèrement remanié par quelques coupes indolores), le récit troublant de la captivité du docteur B. pendant l’occupation nazie de Vienne. La performance est grande. L’hommage au texte de Zweig est majestueux. Fascinante fiction où le personnage principal raconte comment il parvint naguère, grâce à des parties d’échecs imaginaires, à survivre aux méthodes de torture de la Gestapo. S’égrène en arrière-plan une réflexion passionnante à propos des ressorts de la survie mentale, sur laquelle plane le spectre de la folie. Cette narration n’est pas sans rappeler celle de Si c’est un homme (1947), de l’écrivain et chimiste italien Primo Levi, lequel fut déporté à 25 ans au camp de concentration d’Auschwitz, où il resta emprisonné entre 1944 et 1945, et qui mit fin à ses jours en 1987.
Apolline Kaplan
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