Parmi ceux pour lesquels l’ascenseur social a fonctionné admirablement au cours du siècle des Lumières, il y a un petit paysan qui s’appelait Valentin et qui s’enfuit de la maison maternelle pour échapper à un parâtre malveillant, « tigre des plus cruels ». Dans son « chétif village », appauvri par les impôts, où l’on tire le diable par la queue en ne voyant de pain blanc que chez le curé, le garçon n’a pour ainsi dire rien appris : « Mon éducation ne s’étendit guère au-delà de ma nourriture ; on m’éleva à peu près comme on cultive les plantes, c’est-à-dire d’une manière tout à fait végétative. »
Mémoires. Enfance et éducation d'un pays au XVIIIe siècle
Les premières aventures du jeune Valentin, qui commence par tomber dans un piège à loups dont il s’extirpe à grand peine, ne laissent guère présager d’un avenir meilleur que celui de ses compatriotes. Il parvient pourtant, de petit métier en petit métier – il est souvent assigné à la garde des troupeaux – à entretenir et développer un goût certain pour la lecture.
L’enfant d’Arthonnay dans l’Yonne est, dans son approche, un parfait Candide au pays de France : la première fois qu’il voit une rue pavée, il pense être arrivé à Paris. Lorsqu’il croise des galériens sur une rout...
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