Lídia Jorge est une grande voix de la littérature portugaise. Tous ses romans ont été traduits en français par Geneviève Leibrich et publiés chez Métailié. Son oeuvre, sur laquelle vient d'ailleurs de paraître un essai très intéressant (1), est marquée par une grande cohérence. Le livre qui paraît aujourd'hui, "Les Mémorables", est peut-être un peu à part, non par les thèmes qu'il aborde, mais par sa forme, à mi-chemin entre l'enquête et le roman, et parce que la plupart des personnages ont vraiment existé. Ana Machado, journaliste pour une chaîne américaine, revient au Portugal pour réaliser une émission intitulée "L'Histoire réveillée". Accompagnée de deux anciens camarades d'école, elle rencontre des acteurs de la "révolution des oeillets" (avril 1974). Les entretiens sont entremêlés de reflexions des trois jeunes journalistes, et suivis de l'écriture du scénario par Ana Machado. "Les Mémorables" donne une place exceptionnelle à la révolution des oeillets, qui avait déjà été évoquée dans les précédents livres de Lídia Jorge, mais jamais de manière aussi centrale.
Gabrielle Napoli : Pourquoi avez-vous choisi d’écrire un livre sur cet épisode de l’histoire portugaise ?
Lídia Jorge : Deux raisons m’y ont poussée, une raison profonde et ancienne, et une autre plus récente. Depuis que j’ai écrit La Journée des prodiges (2), j’ai toujours pensé qu’il fallait revenir sur cet événement, sur ces vingt-deux heures qui ont constitué un moment presque lumineux de l’Histoire, sur le mystère de l’enchaînement de toutes ces coïncidences positives qui ont permis qu’une révolution pacifique ait lieu....
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