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Le Mortifiement de Vaine Plaisance

Ce manuscrit illustré, Le Mortifiement de Vaine Plaisance (1455), a été acheté en 1951 par Martin Bodmer, intellectuel et bibliophile. Le « bon roi René » (1409-1480), roi de Sicile, duc d’Anjou et comte de Provence, écrit un traité « de l’âme dévote et du cœur », « pour aider les simples gens laïcs à mener une vie salutaire ».

Mécène fastueux, protecteur des arts et politique malheureux, le bon roi René s’est entouré de peintres, de sculpteurs, d’orfèvres. Il a fait copier et enluminer des manuscrits. Il a rédigé des textes originaux.

Dans Le Mortifiement de Vaine Plaisance, le peintre donne à voir les étoffes diverses, les plis élégants des vêtements, les plantes, les rochers étranges, les édifices variés, les anges aux ailes bleues, rouges ou dorées, une foule de combattants cuirassées, un pont de bois, une ville assiégée, un cœur crucifié…

Teotl

Ethnologue et historienne, Carmen Bernand étudie un catéchisme pictographique des Indiens du Mexique. Lors de la conversion de ces Indiens au XVIe siècle, les franciscains encouragent les peintres indigènes à traduire en images l’essentiel de la doctrine chrétienne. C’est ainsi que ces catéchismes sont des sortes de bandes dessinées.

Les pictogrammes de ces catéchismes gardent des éléments des anciennes religions païennes pour donner sens au dogme chrétien. La foi chrétienne est en partie « mexicanisée ».

Carmen Bernand propose un petit lexique pictographique. Par exemple, Marie (sanctifiée par Dieu) tient un bouquet de fleurs et est assise sur un siège. Ou bien, Dieu est coiffé d’un chapeau espagnol ; il est un notable, un juriste qui impose des Commandements. Ou aussi, la parole est évoquée par des volutes sortant de la bouche. Les jambes (indiquées par deux traits en forme de « L ») expriment le mouvement. Ou aussi, un mort est un humain couché, enveloppé d’un linceul. Ou bien, un jaguar gouverne le monde souterrain des morts. Ou aussi, un ange ailé enlève le péché qui sort de l’âme du pécheur… Cette bande dessinée du XVIIe siècle traduit une quête spirituelle qui serait simultanément naïve et énigmatique.

Trois contes étranges (récits chinois)

Un lettré obscur, Pu Songling (1640-1715), rassemble alors plus de 500 contes fantastiques. Interviennent les apparitions inattendues, les divinités animales, les marchands et les fous de livres qui rencontrent les fantômes.

Le manuscrit des trois contes (avec ses illustrations du début du XIXe siècle) est conservé dans les collections de la Fondation Martin Bodmer… Rainier Lanselle décrit et commente 12 illustrations de ces récits.

Turpitudes sociales

Lecteur de Kropotkine et de Jean Grave, ami de Mirbeau et de Félix Fénéon, le peintre Camille Pissaro (1830-1903) dessine en novembre-décembre 1889 des dessins violents, féroces. Un peu plus tard, en septembre 1892, il écrit à Mirbeau : « Y a-t-il un art anarchiste ? Oui ? Décidément, ils ne comprennent pas ! Tous les arts sont anarchistes – quant c’est beau et bien ! »

En secret, Pissaro (proche de Steinlen et de Vallotton) dessine, à la plume, 28 scènes terribles. Il exprime la douleur des misérables et la cupidité des nantis. Il adresse à sa nièce ces Turpitudes sociales et il sait l’ouvrage impubliable à cette époque : un pamphlet clandestin. Pissaro accuse la société. Il commente les dessins : « C’est la guerre des dépossédés contre les dépossesseurs, la guerre des maigres contre les gras, la guerre des pauvres contre les riches : la guerre de la vie contre la mort. (Révolte.) » Il critique « le mariage de raison » ; « le temple du Veau d’or » (la Bourse) ; « le suicide du boursier » ; « l’enterrement d’un cardinal qui avait fait vœu de pauvreté » ; « Jean Misère » qui est affamé ; « l’art dans le marasme » ; le vin des pauvres ; l’accident du travailleur…

Dans sa préface des Turpitudes sociales, Henri Mitterand indique, dans les dessins, les cadrages qui s’élargissent ou se rétrécissent. Les vues de Pissaro illustrent des poèmes de Baudelaire, des romans de Zola. Elles sont aussi un hommage à la Commune.

Gilbert Lascault

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