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Face aux vents

Alors que le Québec sera l’invité d’honneur du Marché de la poésie de Paris, c’est en France que la poète québécoise Hélène Dorion publie son nouveau recueil.
Hélène Dorion
Comme résonne la vie
Alors que le Québec sera l’invité d’honneur du Marché de la poésie de Paris, c’est en France que la poète québécoise Hélène Dorion publie son nouveau recueil.

Le mot « comme » du titre indique les différentes lignes du livre : adverbe de manière annonçant un discours sur la façon dont « résonne la vie » ; ou adverbe de quantité portant une nuance exclamative et laudative. Ce peut être enfin une comparaison. Elle retentit dans une anaphore qui souligne l’approche par assimilation. Une volonté mène à déchiffrer l’apparence, à la rapprocher d’une perspective où l’espérance guide la perception : d’une part, le présupposé « je sais », d’autre part, le pôle « je rêve » ou « je voudrais », en un conditionnel têtu qui fait vaciller le vœu de « transform[er] le chaos en joie ». Dans « le labyrinthe des jours », « les catastrophes […] ne nous sont jamais étrangères ».

La perception accrue de l’absolu, dont la beauté nous transcende, se heurte aux limites du présent. Hélène Dorion, dans une langue à la musicalité légère, avance le vœu de lumière de toujours, ce singulier idéal constamment malmené. La répétition de structures (à la comparaison se joint « on voudrait ») vise à construire un rempart contre la dispersion des éclats de lumière. Alors, la parabole entre « ici » comme la lueur biblique de la Création : 

et au-dessus des ponts, il y eut un visage
il y eut un regard
et l’amour, c’est ici. 

L’éphémère grandit quand l’éternel se tait. Les antithèses structurelles se répondent : de l’ombre à la lumière, elles ouvrent le temps. Toujours se glisse l’instant, promesse incertaine :

Quelque chose de la lumière griffe le paysage

La métaphore rapproche la réalité humaine de ce qui la dépasse. Une durée féconde répare ce qui est d’abord vécu comme une défaite. « Ici » devient le territoire possible d’une transformation. « [D]es oiseaux confiés aux vents » se chargeront d’unir passé et présent : les poèmes sont ces figures de réconciliation.

Les lignes de nos vies qui
se brouillent, s’enchevêtrent et se brisent
n’atténuent pas le don lumineux
ni ces vents durs contre lesquels on écrit. 

Le poème vit de cette volonté de métamorphose et porte la trace d’un « horizon d’or ».

Les mots naissent de paysages déchirés

Sans nous résigner, nous avons « nos cœurs à ouvrir, que chaque amour agrandit ».

Isabelle Lévesque

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