A lire aussi

Livres

Alain Didier-Weill, Freud-Einstein : Mai 1933 (éditions des crépuscules). Extrapolant l’échange de lettres qui eut lieu entre l’inventeur de la psychanalyse et le théoricien de la relativité au début des années trente, le psychanalyste Alain Didier-Weill met en scène ces deux figures du XXe siècle dans un dialogue qui éclaire un peu nos sombres années, et que les éditions des crépuscules ont eu la judicieuse idée de publier. Il s’agit d’une pièce qui a été mise en ondes sur France Culture en juillet 2010, avec les voix, entre autres, de Michel Bouquet (Einstein) et de Pierre Forest (Freud). Alain Didier-Weill imagine une discussion entre Einstein, Freud et sa fille Anna : quelques jours après la prise du pouvoir par Hitler, ils se posent la question de la réaction à adopter lorsque la violence devient le seul organisateur du collectif. Freud à Einstein : « Avez-vous remarqué, Albert, que pour la Bible, le juif n’est pas défini par sa croyance en Dieu mais par sa non-croyance en l’idole ? » 

Dans Les Prisonniers de Lacan : Une introduction au temps logique (Hermann), Julien Copin commente l’article de Lacan « Le temps logique et l’assertion de certitude anticipée » qui nous éclaire sur la logique collective par laquelle un sujet s’identifie à un groupe. La résolution du problème logique dit « du prisonnier » remet en question la logique classique : « Face au malaise contemporain, cette révolte logique prescrit un universel ensembliste. Celui dont le sujet de la civilisation scientifique a besoin pour ne pas retourner contre son prochain une ségrégation qu'il prétend dépasser. » 

Voisinages 

Carlos Parada, Toucher le cerveau, changer l’esprit : Psychochirurgie et psychotropes dans l’histoire des transformations technologiques du sujet (Puf). Avec cette histoire de la psychochirurgie et des neuroleptiques, Carlos Parada, psychiatre et membre du bouillonnant Collectif des 39, nous apporte de bien utiles éléments de réflexion à l’heure où la psychiatrie en revient à la seule et misérable solution de la contention (les députés l’ont déclarée thérapeutique pour faire passer les coupures des budgets et la destruction des équipes d’accueil et des soins décents). Dans Toucher le cerveau, changer l’esprit, on apprend comment et pourquoi, avant de se passionner pour la psychanalyse, la psychiatrie française s’était montrée particulièrement emballée par la psychochirurgie des psychoses (lobotomies, mais aussi leucotomies ou topectomies – « excisions bilatérales et localisées dans le cortex cérébral »). À propos : le film de Nurith Aviv, Poétique du cerveau, vient de sortir en DVD. À partir de souvenirs qui émergent de ses photos de famille, Nurith Aviv mêle des réflexions de neurologues et de psychanalystes sur la mémoire, le bilinguisme ou la lecture.  

Revues 

Le numéro 134 de la revue Topique fait le point sur les prescriptions sexuelles des religions, et le numéro 27 de La clinique lacanienne prend pour thème « Pourquoi la guerre ? », réexaminant la correspondance entre Freud et Einstein publiée sous ce titre, et relevant le défi « d’interpréter la pulsion de mort ». Ce qui rend nécessaire de lire également l’ouvrage de Gilles Dostaler et Bernard Maris, Capitalisme et pulsion de mort (publié en 2010 chez Albin Michel), où l’on vérifiera que Bernard Maris avait lu Freud de très près – les psychanalystes pourraient en prendre de la graine et lire d’un peu plus près les économistes, et pas seulement Marx, qu’on lit parce que Lacan en fait l’inventeur du symptôme (de la notion de plus-value à celle de « plus-de-jouir »). Bernard Maris et Gilles Dostaler montrent la convergence et l’actualité de certaines analyses de Freud et de Keynes, deux génies qui se lisaient et se citaient mutuellement.  

Rencontres 

Une présentation du livre de Michel Juffé, Sigmund Freud Benedictus de Spinoza : Correspondance 1676-1938 (Gallimard, coll. « Connaissance de l’inconscient », voir NQL n° 1149) aura lieu à la librairie Tschann en présence de l’auteur et de l’éditeur, Michel Gribinski. Mercredi 18 mai à 20 h. 125, boulevard du Montparnasse, 75006 Paris.

Signalons aussi « Chemins de Nietzsche », une journée d’études proposée par l’École lacanienne de psychanalyse et la revue Spy, avec cette question : « Traversant le champ freudien, que deviennent les chevaux de Nietzsche ? ». Dimanche 22 mai 2016 à la Maison de l’Europe de Paris. 35, rue des Francs-Bourgeois, 75004 Paris (école-lacanienne.net).